En douceur, «La Romancière, le film et le heureux hasard» explore des gouffres

Première rencontre, moins fortuite qu’il n’y paraît, entre la romancière (Lee Hye-young), la libraire (Seo Young-hwa) et son assistante (Park Mi-so). | Arizona Distribution

Le nouveau film de Hong Sang-soo accompagne son personnage principal au fil de rencontres qui semblent anodines et où se déploie un immense paysage d’émotions, d’angoisses, de désirs.

– Bonjour… Ah c’est toi! Quelle bonne surprise de te rencontrer ici. – Oh, comment vas-tu, il y a si longtemps qu’on ne s’est vues…  On dit «small talk», qui n’est pas exactement du bavardage, tout de suite péjoratif. Là, il s’agit seulement de conversations aux enjeux apparemment minimes, de paroles de circonstances.

L’écrivaine qui a eu du succès mais n’écrit plus a fait le voyage depuis Séoul pour revoir l’ex-amie, qui a quitté la capitale incognito pour ouvrir une petite librairie dans cette ville moyenne.

Plus tard, elle croise par hasard un réalisateur qui devait autrefois adapter un de ses romans et ne l’a pas fait, et qui fut aussi son amant, et est aujourd’hui accompagné de sa femme. Ce sera ensuite la rencontre d’une actrice vedette qui s’est mise à l’écart des plateaux et de la célébrité, à qui elle propose de faire un film ensemble.

Puis, revenue à la librairie, l’écrivaine s’attable avec la libraire et l’actrice, mais aussi un poète vieillissant qu’elle a bien connu et une jeune fille qui étudie la langue des signes.

À chaque rencontre ou retrouvaille s’enclenchent ces échanges où se mêlent à doses homéopathiques politesse, curiosité, amertumes, rancœurs, fragments de souvenirs affectueux ou amusants, hypothèses plus ou moins solides, projets plus ou moins sincères.

Un film de terreur

Un film en surface autour de la parole, des mots échangés? Oui, en effet. Et pas du tout. La Romancière… est un film d’une grande violence. C’est aussi un film extrêmement physique, où le langage des corps, les expressions, les gestes accomplis, esquissés, retenus, racontent en permanence bien davantage que ce qui se dit (et qui importe aussi).

Il y a la douleur et la mort, la peur de vivre et celle de crever, il y a des existences tordues ou amputées, et des gouffres de panique. Partout, sans cesse. Le vingt-septième film de Hong Sang-soo est un film de terreur, une tragédie. D’autant plus que cela ne se remarque pas tout de suite, ou même seulement après qu’il est terminé.

Autour de l’actrice (Kim Min-hee), le jeune homme empressé (Ha Seong-guk) et la romancière. | Arizona Distribution

La légèreté fluide des circulations, dans ce noir et blanc doux et lumineux qui paraît mettre chacune et chacun au même niveau, selon une sorte d’égalité de présence qui est un leurre parmi tant d’autres, participe de l’apparence de lac paisible où flotteraient les relations. (…)

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