La comédie musicale de Damien Chazelle trouve la manière de rendre hommage aux modèles de jadis sans reconduire les idéaux optimistes d’une Amérique qui a depuis bien changé.
Avouons avoir trouvé pénible l’injonction d’admirer répandue urbi et orbi par une promotion agressive. Pour être en revanche aussitôt conquis par la séquence d’ouverture de La La Land.
Cette déclaration d’amour au genre venge d’emblée du jour sombre où le nullissime Chicago version Rob Marshall usurpa le titre de modèle de la comédie musicale hollywoodienne. Un plan séquence, des gens qui dansent vraiment, un sens de l’espace et des corps, un geste de cinéaste à la gloire de ce à quoi il va se confronter, coup de chapeau immédiat à Busby Berkeley et à Bob Fosse. De quoi accepter d’oublier la post-synchro médiocre, question hélas balayée par 30 ans de civilisation du clip. OK, let’s go for it.
La La Land est bien une réussite dans la réhabilitation de la comédie musicale hollywoodienne. Et ce n’est pas parce qu’à peu près tout le monde l’a dit et écrit qu’on s’astreindra à prétendre le contraire.Ryan Gosling en pianiste de jazz obsessionnel est plus que convaincant, Emma Stone en provinciale rêvant de devenir star est mieux que ça. Leur idylle dans les décors enchantés d’un Los Angeles voué au show-bizness traversera les projections mentales, sensuelles et souriantes de Fred Astaire, de Gene Kelly, de Vincente Minnelli et de West Side Story sans jamais démériter de ses modèles.
Et la construction du récit comme le choix des musiques parcourt en dansant le fil instable tendu entre citations de tous les grands classiques et déplacement des poncifs du genre, juste ce qu’il faut pour garder une tension et une fraicheur, jamais trop loin pour ne perdre personne en chemin.
Le film de Damien Chazelle fait donc plaisir à voir. Que fait-il d’autre? Il cherche.