L’élan vital de «Dirty Difficult Dangerous»

Mehdia (Clara Couturet) et Ahmad (Ziad Jallad), une histoire d’amour à l’épreuve de tant de frontières.

Le film de Wissam Charaf invente une idylle à la fois réaliste et magique, contemporaine et légendaire, entre une jeune servante éthiopienne et un survivant de la guerre en Syrie.

Mehdia chante parmi les femmes, dans leurs beaux habits. Il y a de la joie et de la ferveur, un sens puissant du collectif, un élan rythmique, une vibration. Ça n’a (presque) rien à voir avec ce qui va se passer ensuite, mais d’emblée la tonalité du film est perceptible.

Mehdia est Éthiopienne, sans-papiers, elle travaille comme aide à domicile dans un appartement cossu de Beyrouth, fait le ménage et prend soin du vieil homme qui perd la tête et devient parfois agressivement libidineux.

Dans la rue, passe et repasse Ahmed, survivant de la guerre civile syrienne, exilé portant dans son corps les traces de la violence. Chacune et chacun est le produit d’une histoire différente et si lourde. Au Liban, leurs trajectoires se sont croisées. Et entre eux s’invente une forme à la fois éperdument romanesque, dramatiquement pragmatique et très singulière de l’amour.

Comme tout ça n’est clairement pas raisonnable, ça va se casser la figure. Il va falloir tout changer, partir, fuir, inventer, s’aimer encore, se cacher, croiser d’improbables situations, du plus sombre au plus radieux.

«Sale, difficile, dangereux»? Les trois D du titre du film caractérisent le monde dans lequel survivent, vivent, agissent et rêvent la frêle et énergique jeune femme à la peau noire et le grand flandrin mélancolique, dont la peau et la chair sont imprégnées des effets d’une guerre impitoyable.

Des chemins de traverse

C’est la belle aventure à laquelle convie le deuxième long métrage du cinéaste libanais Wissam Charaf. Saturé des réalités contemporaines de la région, et de leur immense poids de tragédies et de conflits (militaires, ethniques, religieux, sociaux), Dirty Difficult Dangerous emprunte sans cesse des chemins de traverse.

Ces sentiers de l’humour, du fantastique et de la sensualité n’édulcorent rien des réalités, mais au contraire y redonnent accès, par-delà les brouillages de la saturation d’information des médias, par-delà la chape de plomb d’un malheur si grand qu’il ferait détourner le regard.

Mehdia, femme de ménage exilée et exploitée, filmée aussi comme une princesse. | JHR Films

La traite des employées de maison venues d’Afrique et d’Asie et soumises à un quasi-esclavage, le racisme anti-Syriens d’une grande partie de la population libanaise –phénomènes dans les deux cas soutenus par les autorités–, les trafics d’organes, l’extrême dénuement des camps de réfugiés, les pratiques inadaptées de certaines ONG font partie des composants concrets que mobilise le film. Mais toujours dans la dynamique d’un récit aux côtés de ses deux protagonistes. (…)

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