Les corps étranges de Mahamat Saleh Haroun

Grigris de Mahamat Saleh Haroun

Passé injustement inaperçu lors de sa présentation à Cannes en compétition, Grigris est un film qui ressemble au personnage qui lui donne son nom: à la fois difforme et super-élégant, tonique et en porte à faux.

Grigris est le surnom d’un jeune homme en partie paralysé, et pourtant le meilleur danseur des nuits de N’Djamena. Il est à la fois un laissé pour compte et l’objet d’une admiration, voire d’une fascination suscitée par ses prestations dans les boîtes de nuit, admiration et fascination dont il ne sait que faire.

Dès la séquence d’ouverture, le spectateur se retrouve exactement dans les mêmes conditions, fasciné par la virtuosité du danseur qu’interprète Souleymane Démé et désorienté par ce corps singulier et par l’inadaptation évidente de Grigris à son environnement, dès qu’il arrête de danser, et malgré sa débrouillardise dans ses autres petits boulots.

La situation de Grigris est aggravée, démultipliée par sa rencontre avec Mimi, la prostituée métisse, à la fois attirante, trop soumise et maladroite, interprétée avec une grâce très fragile par la belle débutante Anaïs Monory. Mimi non plus n’est pas à sa place dans aucune des communautés, castes et clans qui régissent ce monde-là —qui régissent le monde.

Souleymane Démé et Anaïs Monory

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