La troupe du Français, à la limite…
Entre cour séductrice et jardin des délices, entre chronique et rêve, le film de Christophe Honoré est une aventure joyeuse et sensuelle à l’époque du Covid.
Quel étrange bonheur… Guermantes n’est ni le premier ni le dernier film inspiré par le Covid et ses conséquences, mais c’est très probablement le plus réjouissant.
On ne sait pas, on ne saura pas dans quelle mesure ce qu’on voit a été concerté, écrit, ou inventé au gré des circonstances, et cette incertitude participe de la douce euphorie que suscite la vision du film.
Il y a les acteurs et actrices de la Comédie française dans une salle de répétition. Il y a quelque chose qui tient d’un débat politico-syndical sur ce qu’il convient de faire, et sur qui décide. Il y a le fantôme de Marcel Proust dont il s’agissait de transposer à la scène un des volumes de La Recherche, et la présence du metteur en scène, Christophe Honoré, pas content de ce que trament ses comédiens.
Il y a des rires et des colères, des secrets et beaucoup d’émotions, de la séduction à tiroir et à l’envi. Une promiscuité dont les multiples ambivalences ne sauraient être toutes levées. Les corps interprètent plusieurs rôles à la fois, dans plusieurs registres. L’énergie circule. Répètera, répètera pas? Joueront, joueront pas? Et pourquoi? Et pour qui?
C’est soudain très urgent, très sensible, tout autour rôdent des décisions administratives concernant la pandémie, un virus vraiment dangereux, des angoisses de multiples natures, des injonctions diverses et parfois contradictoires. C’est l’été.
Songe d’une nuit de théâtre et de vie
Celle-ci joue à surjouer les émotions qu’elle éprouve intimement, douloureusement. Celui-là fait mine d’assumer son personnage de fiction pour obtenir dans les coulisses ce que lui promet le texte sur scène. Une autre trahit la séparation entre rampe et salle, intérieur et extérieur, espionne les appels au téléphone des camarades et transmet les informations de travers.
Le cinéaste face aux acteurs en scène. Le cinéma face au théâtre? | Memento distribution
Les gestes, les regards, les distances entre une main et une épaule ou une cuisse deviennent arènes de combat et alcôves d’amour. (…)