«Être vivant et le savoir» ou le parti pris des êtres

Ex-voto, bricolage, des bouts de choses quotidiennes peut-être un peu chargées de magie, pour avoir affaire à l’abîme.

Le film d’Alain Cavalier avec son amie Emmanuèle Bernheim devait être une quête autour de sa propre mort. Mais une autre fatalité est venue bouleverser ce projet, et le porter sur les rivages du tragique.

Au dernier Festival de Cannes, ce fut un événement singulier et un peu en marge puisque présenté hors compétition. Le nouveau film d’Alain Cavalier, Être vivant et le savoir est de toute façon un cas à part, y compris dans l’œuvre déjà si personnelle, si marquée par les partis pris de réalisation de son auteur.

Pourtant ce documentaire au ras du quotidien semble de prime abord reprendre les caractéristique désormais habituelles du signataire du Filmeur, petite caméra portée, pas d’équipe de tournage, voix off du réalisateur accompagnant les images en train de se faire.

Mais c’est pour explorer des chemins inédits, chemins que n’avaient certes pas prévus les deux protagonistes de cette étonnante aventure de vie et de mort.

Cavalier avait prévu de tourner un film avec son amie l’écrivaine Emmanuèle Bernheim. Plus exactement une adaptation du livre où elle raconte la mort de son père, parti en Suisse mettre fin à ses jours, Tout s’est très bien passé.

Elle devait jouer son propre rôle et Cavalier celui du père. Par petites touches légères malgré la gravité du sujet, se met en place un projet tout frémissant d’amitié, de plaisir des deux complices à jouer avec cette perspective du travail en commun, d’approche attentive des possibilités d’évoquer une situation telle que la mort d’une personne très aimée.

À ce moment, la relation entre personnes (Alain Cavalier, Emmanuèle Bernheim), personnages (Emmanuèle Bernheim, son père) et situations évoque en partie le tandem de fiction déjà initié par Cavalier dans Pater, avec Vincent Lindon. Emmanuèle et Alain s’amusent presque à l’idée de jouer, comme on dit pour les personnes qui jouent la comédie et pour les enfants. Sauf qu’ils vont jouer à la mort. La mort bien réelle d’un proche de l’une d’entre eux. D’autres ombres passent, celles qu’a évoqué le prologue du film, consacré à la relation d’Alain Cavalier avec une autre amie, atteinte d’une maladie incurable, durant ses derniers instants. Il s’y déploie d’emblée quelque chose d’indicible, qui flotte entre tendresse, rituel, révolte et sagesse. Ça, qu’on recouvre du mot de «deuil» comme d’un linceul, justement, pour ne pas voir le réacteur atomique qui rougeoie là.

Avoir filmé en face la mort de ses proches

On se souvient alors que Cavalier fait partie de ces rares cinéastes qui aura su, qui aura voulu filmer la mort en face, et d’abord celle de ses propres parents. Un cinéaste qui, c’est tout aussi rare, aura véritablement pris au sérieux ce qui se trafique dans le fait de tuer des gens, fussent-ils des personnages de fiction.

Il en a d’ailleurs fait un court métrage, Faire la mort, où il questionne ses propres utilisations de la souffrance et du meurtre comme matériau dramatique et spectaculaire dans ses propres films de fiction, et la place de «ses» morts –les corps sans vie de son père et sa mère successivement apparus dans son cinéma.

Ce questionnement ricoche sur la présence de la mort dans nos vies, présence pas nécessairement sinistre, bien au contraire, comme on l’a vu avec l’évocation d’une femme très aimée, Irène, mais aussi, très différemment, à propos des cycles de la nature, des mythes et de nos relations intimes avec eux, dans Le Paradis.

La proposition d’Alain Cavalier à Emmanuèle Bernheim prend dès lors l’apparence d’une continuation, avec un petit air de pacte faustien. Mignonne allons voir si la camarde se laisse un peu filmer par le travers, avec le secours de ton expérience, et de ton écriture –l’autrice de Tout s’est très bien passé a évidemment vécu ce qu’elle décrit avec une pudeur qui est celle d’une artiste de la littérature en même temps qu’un témoignage de première main.

Des notes en vue d’un film d’après un livre, vraiment?

On croirait donc de prime abord qu’il s’agira d’un nouveau chapitre de cette quête qui, sous l’apparente légèreté affectueuse et souriante de ses réalisations, habite le cinéaste Alain Cavalier, quête au long cours de celui qui fut aussi l’auteur du dépressif Ce répondeur ne prend pas de message et du terrible Libera me.

Mais on est loin du compte. Du compte à rebours. (…)

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Cannes 2019, Ep.3: Croisette des esprits, bien réelle magie du cinéma

Venus du Brésil, du Sénégal, du Congo et de France, quatre films aussi remarquables que différents ont illuminé une journée d’une richesse merveilleuse, à tous les sens du mot.

Ce jeudi 16 mai, les esprits étaient là. Cannes aura accueilli de multiples manières les djinns et les envoûtements, convoqués sur grand écran à des titres divers, fictionnels ou documentaires, ou les deux, bénéfiques ou inquiétants, ou les deux. Et toujours, cela tenait de la magie bien réelle de ce rituel d’invocation connu sous le nom de cinéma.

Bacurau, fresque baroque et libertaire

C’est une fresque lyrique et violente, où passe le souffle de l’épopée, qu’ont concoctée ensemble les Brésiliens Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles.

Bacurau est à la fois le nom du film présenté en compétition officielle et celui de cette bourgade perdue dans le Pernambouc où règne une vie collective attentive au bien commun et à la liberté de chacun.

Cet îlot d’utopie est contraint d’affronter les menaces conjuguées de la sécheresse déclenchée par les puissants qui se sont appropriés les ressources en eau, du gouverneur corrompu, et de yankees pratiquant le shoot ’em up à balles réelles.

Attaqués, les habitants de Bacurau pleurent leurs morts mais se préparent à la résistance.

Mais les habitants de Bacarau ne sont pas que des doux rêveurs préoccupés de bien élever les enfants et de prendre soin de la nature. Ces femmes et ces hommes savent aussi se battre. Et faire appel aux éternels rebelles de l’histoire longue d’un Brésil transgressif, ici incarné par une sorte de voyou trans et illuminé, version millennial des cangaceiros de jadis.

Entre guérilla subtile, massacres des pauvres tout ce qu’il y a de réalistes dans cette région du monde, et figures plus ou moins mythiques, les réalisateurs brésiliens réussissent une fable pleine de bruit et de fureur, mais aussi de magie et de gags.

Bacurau est supposé se passer dans un futur proche. Avec l’arrivée au pouvoir à Brasilia du fasciste Bolsonaro, ce futur est devenu terriblement présent. Si le film, hanté de multiples figures extrêmes, ne prétend à aucun réalisme stricto sensu, il n’en évoque pas moins une réalité qui menace de devenir des plus actuelles, fut-ce sous des formes moins spectaculaires.

Atlantique, les amants de légende, par-delà corruption et noyade

Également en compétition, Atlantique est le premier long-métrage de Mati Diop, déjà remarquée en 2004 pour l’admirable moyen-métrage Mille Soleils.

Si elle repart, littéralement, de la situation de départ du chef-d’œuvre signé par son oncle Djibril Diop Mambety, répétant la grande scène de déclaration d’amour au bord de l’eau du début de Touki Bouki, c’est pour raconter une histoire d’aujourd’hui.

Ada (Mama Sané), l’héroïne amoureuse et combattante.

Une histoire au temps de grands chantiers faisant surgir des tours arrogantes et inutiles dans les métropoles d’Afrique, construites par des ouvriers surexploités et méprisés. Une histoire au temps des pirogues qui s’élancent sur l’océan, chargées d’hommes en quête d’une vie meilleure, et qui trop souvent sont dévorés par les vagues.

Cette histoire, sentimentale et réaliste, violente et tendre, Mati Diop la filme avec une attention sensuelle aux visages et aux corps des jeunes gens qui en sont les principaux protagonistes. (…)

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«Le procès contre Mandela et les autres» et «6 Portraits XL», deux aventures documentaires

Andrew Mlangueni, l’un des co-accusés du procès de Rivonia, écoute sa déposition devant le tribunal, un demi-siècle plus tôt.

Le récit au présent du procès des résistants contre l’apartheid il y a 55 ans par Nicolas Champeaux et Gilles Porte avec les dessins d’Oerd, et la série des portraits tournés par Alain Cavalier explorent des voies aussi différentes qu’également originales pour explorer et donner à comprendre la réalité.

Des héros, des vrais, dont on admire sans réserve les actes et les idées, cela ne se trouve pas si souvent. Un film avec neuf personnages comme cela bénéficie donc d’un attrait immédiat. C’est loin d’être le seul.

Les réalisateurs français ont reconstitué l’arrestation et le procès des neuf dirigeants de l’ANC, capturés par la police du régime raciste sud-africain en 1963, et jugés lors du procès de Rivonia.

L’un d’entre eux est ultra-célèbre, Nelson Mandela. Les autres, qui avaient désigné Madiba comme leur principal porte-parole, ne lui cèdent en rien en courage et en intelligence politique. Ils encourreront d’ailleurs des peines aussi lourdes.

Christophe Champeaux et Gilles Porte ont construit leur film grâce à l’existence à trois archives très différentes: classiquement avec des documents visuels montrant la longue lutte contre l’apartheid, mais surtout avec deux ressources originales, l’enregistrement sonore du procès, et la présence des trois hommes encore vivants parmi ceux qui se trouvaient sur le banc des accusés, ainsi que deux de leurs avocats.

Noirs, blancs, indiens, métis, ces vieux messieurs qui ont incarné sans faillir le courage et la droiture offrent, par leur présence à l’image, une réalité physique que l’âge ne rend pas fragile, et que leur humour et leur énergie actuelle font vibrer.

Une archive de la longue lutte contre le régime d’apartheid

Le cinéma, c’est toujours voir au présent des êtres et des situations qui ont été enregistrées dans un autre présent, celui du tournage. Le très simple dispositif qui consiste ici à faire écouter au moment de ce tournage les traces d’il y a cinquante-cinq ans démultiplie à l’infini ce processus.

À elle seule, cette situation confrontant les sons de jadis et les corps de maintenant serait d’une richesse étonnante. Sans même parler de la valeur des documents sonores alors enregistrés, autre manifestation de cette collision de temporalités différentes: les mots du racisme d’alors, la violence ouverte, sûre d’elle-même, de l’apartheid, détonnent à nos oreilles actuelles. Mais qui peut dire que les injustices criantes qu’elles traduisent sont d’un autre temps?

Déplacements et circulations

Le travail effectué par Christophe Champeaux, journaliste qui connaît très bien l’Afrique du Sud où il a longtemps été correspondant, et le cinéaste Gilles Porte, à qui on devait en particulier l’étonnant et fécond dispositif de Dessine-toi, met en jeu ces circulations à travers les époques, et ce qu’elles mobilisent à la fois de compréhension des événements passés, et d’émotions actuelles.

Leur récit est évidemment centré sur le procès, mais il ne s’y limite pas. Il l’inscrit dans le réseau des événements de l’époque, dans l’histoire de l’Afrique du Sud jusqu’à aujourd’hui, et dans les effets de ce moment-clé qu’a été le procès dans l’existence des gens personnellement liés aux protagonistes, composant ainsi une riche matière où histoire et chroniques individuelles s’associent de multiples manières.

Le face à face entre le juge et Nelson Mandela, dessin d’Oerd

Leur entreprise est considérablement enrichie d’une autre mise en circulation, cette fois entre images documentaires et animation. Avec le concours inspiré du graphiste Oerd, les réalisateurs donnent une présence visuelle à ce qui n’existait plus que sur la bande son.

Du bon usage de l’animation documentaire

Les dessins en noir et blanc d’Oerd opèrent à leur tour des déplacements. Certains, réalistes, évoquent les scènes de l’arrestation brutale des dirigeants de l’ANC et des moments significatifs du procès, en particulier des affrontements pied à pied avec le procureur.(…)

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«Wajib», «Phong», «L’Insoumis», trois échappées sur grand écran

Venus de Nazareth, de Hanoï ou d’un lointain passé, signés par la Palestinienne Annemarie Jacir, le couple franco-vietnamien Tran Phuong Tao et Swann Dubus ou Alain Cavalier, trois films à dénicher parmi les (trop) nombreuses sorties de cette semaine.

«Wajib»

La réalisatrice palestinienne Annemarie Jacir a beaucoup à exprimer sur l’état de l’endroit où elle vit. Cela se comprend. Cette urgence limite sa disponibilité à explorer ce que le cinéma pourrait justement apporter à ce qu’elle tient à faire entendre.

Wajib, son troisième long métrage, est ainsi ce qu’on nomme un film de dispositif: un principe de base organise la succession de situations. Et ces situations sont destinées à illustrer les informations que la réalisatrice entend faire passer.

Mohammed et Saleh Bakri, père et fils à la ville comme à l’écran (©jbaproduction)

Le dispositif est ici la tournée dans les différents quartiers de Nazareth, la plus grande ville arabe d’Israël. Tournée qu’effectuent un père et son fils pour inviter la famille et les plus ou moins proches et obligés au mariage de leur fille et sœur. L’occasion de dresser un portrait d’une société laminée par la domination coloniale juive.

Le père, professeur respecté, a depuis longtemps choisi de négocier «au moins pire» avec les autorités, tout en respectant les règles traditionnelles de cette communauté qui compte presque autant de chrétiens que de musulmans. Le fils, qui vit en Europe, incarne à la fois le maintien d’un esprit de résistance antisioniste et une idée de l’existence plus moderne.

Les personnages sont interprétés par deux acteurs palestiniens connus, Mohammed et Saleh Bakri, qui sont véritablement père et fils. À l’instar du film dans son ensemble, ils jouent de manière si signifiante que ce lien qui aurait pu être troublant, déstabilisant, reste un simple artefact.

Bande annonce du film. 

Au fil des visites, des conflits, des rebondissements, se compose donc une succession de vignettes dont on ne discutera pas la pertinence, mais qui risqueraient de relever davantage d’un théâtre d’intervention. Heureusement, le cinéma est un allié qui agit même quand on ne compte guère sur lui. (…)

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Premiers plans à Angers, salut Cavalier

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Le Festival Premiers Plans d’Angers, dont la 28e édition se tient du 22 au 28 janvier, c’est quoi? Une vitrine pour des premiers films européens, et des films d’école réalisés dans toute l’Europe: c’est sa raison sociale, et toujours une de ses dimensions importantes. Mais aussi un des festivals les plus fréquentés de France, notamment par des lycéens et des étudiants. Et encore, un lieu d’échange où se rencontrent artistes, professionnels, médias et responsables de pouvoirs publics, ou l’occasion de découvrir des premiers films chinois, d’écouter la lecture de scénarios de films au futur…. Et c’est l’occasion, devant des publics toujours nombreux, de rétrospectives travaillant à construire ou à entretenir la place que de grands cinéastes occupent dans l’histoire de leur art et dans l’imaginaire collectif.

Cette année, c’est surtout le cas de Milos Forman, grande figure d’un cinéma aimanté par les polarités des cultures européennes et états-uniennes, artistes ayant traversé les bouleversements politiques, artistiques et intellectuels de la deuxième moitié du 20e siècle avec une lucidité joueuse et une inventivité curieuse sans grand équivalent. Et c’est aussi le cas d’un cinéaste à la fois reconnu et toujours à découvrir, Alain Cavalier.

Comme beaucoup de jeunes gens de sa génération, celle qui aura 20 ans au début des années 1950, le jeune Alain Fraissé voulait faire du cinéma. Il s’inscrivit donc à l’école de cinéma, l’IDHEC, y fut diplômé, puis devint assistant d’un des meilleurs parmi ses prédécesseurs dans cette institution, Louis Malle.

Lorsqu’il devient réalisateur à son tour avec le court métrage L’Américain en 1958, le jeune homme devenu Cavalier entre en cinéma au moment où celui-ci, dans le monde mais singulièrement en France, connaît une révolution. Ce ne sera alors pas son affaire, et les quatre films tournés dans les années 60 n’appartiennent pas à la Nouvelle Vague. Cavalier est pourtant attentif au monde dans lequel il vit, et aux mouvements qui l’agitent. Ses deux premiers longs métrages figurent parmi les œuvres importantes (moins rares qu’on ne le dit souvent) que le cinéma français aura consacré à la guerre d’Algérie. Ce qui vaudra au Combat  dans l’ile (1962, inspiré de l’attentat de l’OAS contre le Général De Gaulle au Petit-Clamart) et à L’Insoumis (1964, inspiré d’exactions de l’OAS contre une avocate) des difficultés avec la censure, le deuxième étant d’abord interdit puis considérablement coupé.

Liés à l’actualité, ces deux films sont aussi des films de genre, des thrillers, film de complot pour le premier, de poursuite pour le second. Tout comme seront des films de genre les deux suivants, film de hold-up avec Mise à sac (1967), drame sentimental et étude psychologique adaptée d’un roman à succès avec La Chamade (1968, d’après Françoise Sagan, avec Catherine Deneuve et Michel Piccoli – et des costumes d’Yves Saint Laurent). Ces quatre films sont tous des réussites, à l’intérieur d’un certain nombre de convention – le dernier offrant ce qui reste, près de 50 ans après, un des plus beaux rôles de Deneuve.

Une carrière large et prestigieuse comme l’avenue des Champs Elysées s’ouvre alors devant Alain Cavalier en train de conquérir une reconnaissance professionnelle et publique, artisan stylé promis à un bel avenir dans le système du cinéma français version mainstream haut de gamme, avec budgets importants, vedettes, élégance de la réalisation, vernis culturel et recettes efficaces. Deux événements, l’un public, l’autre privé, vont emmener Cavalier sur des chemins autrement escarpés, ludiques, exigeants et personnels.

L’événement public, appelons-le Mai 68, et le bouleversement des représentations et des rapports humains que ce séisme fait courir à travers la société dans les années qui suivent. L’événement privé est la mort de sa femme, l’actrice Irène Tunc, dans un accident en 1972.

Le premier effet de ce double séisme est un long silence, de huit ans, avant que ne sorte un nouveau film. Le deuxième effet, directement relié à l’onde de choc de Mai, est ce film de 1976, Le Plein de super, film libre et vif, inventé en route avec quatre copains comédiens. Comme si Cavalier découvrait pour lui-même la Nouvelle Vague 15 ans après, et s’y trouvait délicieusement bien. Pas d’imitation ici, ce film ne ressemble ni à du Godard, ni à du Varda, ni à du Rohmer mais, justement, la joie d’une découverte de chaque instant, d’une invention, d’une énergie.

Contrepoint très sombre et directement lié à l’autre événement, le radical Ce répondeur ne prend pas de message en 1979 témoigne à la fois d’une époque difficile pour l’homme Cavalier et de la capacité du réalisateur à faire de sa solitude et de sa vision très sombre le matériau d’un travail de cinéma profond et rigoureux. Personne alors, à commencer par l’intéressé, ne peut savoir combien ces deux films préparent la réinvention majeure qui adviendra 15 ans plus tard.

Il faudra pour cela passer par deux films qui poursuivent, sur un mode intimiste et à l’écriture très ouverte, l’impulsion du Plein de super, avec le couple de Martin et Léa (1979) et le tandem père-fille d’Un étrange voyage (1981).

Mais Cavalier veut, doit aller plus loin dans la réinvention des manières de filmer. Et ce seront deux merveilles, une lumineuse et l’autre sombre, l’une qui le rendra soudain très célèbre, et l’autre qui passera presqu’inaperçue. Thérèse, ovationné au Festival de Cannes 1993, succès public inattendu, s’enferme dans le cocon d’un studio pour trouver d’autre échappées vers les routes au longs cours de l’esprit, de la jeunesse, du désir, à propos d’une star contemporaine appelée Thérèse de Lisieux, petite sainte paysanne de la fin du 19e siècle. Le second, le bouleversant Libera me (1993), à nouveau contrepoint douloureux du précédent, en reprend le dispositif minimaliste et fermé, pour explorer les chemins de la terreur telle que les humains l’infligent aux humains, ici et ailleurs, maintenant, jadis et naguère.

Avec les années 70, Cavalier a gouté aux vents de la liberté, dans l‘euphorie et dans la douleur, ces vents le poussent toujours plus loin, l’éloignent davantage du cinéma formaté, des règles du métier et du jeu social. C’est encore le cas avec la série de Portraits (1991), portraits de femmes au travail, mais aussi en filigrane de lui-même se confrontant de plus en plus ouvertement, intimement, personnellement, au monde et à ceux qui le peuplent.

Quand apparaissent les premières caméras numériques, légères, autonomes, bon marché, c’est comme si toute sa trajectoire antérieure les attendait. A nouveau un événement public, l’avènement du digital, croise en événement privé, l’apparition dans la vie du réalisateur de la cinéaste, productrice, monteuse, princesse des steppes orientales et des théières culottées,  grande prêtresse ornithophile Françoise Widhoff. C’est de cette double rencontre que le film justement intitulé La Rencontre (1996) porte témoignage.

Désormais le cinéaste est seul, et découvre que c’est ce dont il rêve depuis 25 ans. Seul, c’est à dire plus près du monde, plus près des autres, plus près de la lumière, de la femme qu’il aime, plus près de ses propres pensées et émotions, plus près des enfants, des chevaux, des fantômes, des chats, des comédiens, des humains de rencontre, de passage, de grande affection. A 65 ans, Alain Cavalier devient le plus jeune et le plus moderne cinéaste de son époque.

Commence, totalement inédite et unique et totalement cohérente avec sa longue histoire, la formidable aventure que scandent notamment Le Filmeur (2005) dont le titre sert désormais à qualifier la manière d’être et de faire de son auteur, Bonnard (2005), Irène (2009), Pater (2011) ou Le Paradis (2014). Jusqu’au tout récent Le Caravage (2015). Il y a du documentaire, il y a de la fiction, il y a de l’essai et du journal, il y a du cinéma partout, mais autrement. Ce sont ses images, cadrées par son œil et sa main et habitées par sa voix dans le même mouvement, inouï, de la prise de vue et de la prise de parole. Ces images-voix, rythmées par son souffle et son montage, accueillent le très proche et le très vaste, le très concret des choses et les plus nécessaires et généreuses idées. Cinéma à la première personne du singulier, ouvert sur l’infini de l’univers.

(Le texte sur Alain Cavalier figure également dans le catalogue du Festival Premiers Plans).

« Le Caravage », un monde de cheval

cavalierLe Caravage d’Alain Cavalier. Avec Bartabas. Durée: 1h10. Sortie le 28 octobre 2015.

Il semble au début que ce soit une géométrie assez simple, un triangle ABC. A(lain Cavalier) filme B(artabas) faisant faire des exercices à son C(heval). Mais la figure est un peut plus compliquée, il y a un C’, Caravage. C’est le nom du cheval, mais justement, du coup, ce n’est plus « un » cheval, plus seulement.

La géométrie dans l’espace, dans l’espace des petits matins aux écuries et au manège du Fort d’Aubervilliers, ne disparaîtra pas. Elle se complexifiera et s’enrichira. Et il apparaîtra bientôt que c’est tout autant de l’algèbre, de l’amour, et de la mythologie. Algèbre d’une équation équestre qui semble associer trois valeurs (A, B, C), trois êtres de grande valeur.

Mais c’est une équation à une inconnue. Élémentaire? Oui, au sens où il s’agit bien des éléments, de la matière, de ce qui précède et excède le langage, le savoir, l’imagerie. Mais aussi vertigineux, abyssal. L’inconnu est au centre, il est dans l’écart en C et C’, il est dans cet être qui conquiert et occupe peu à peu tout l’espace, physique et mental. «Le» cheval, Caravage.

Alain le filmeur est arrivé avec sa petite caméra, il a dit « bonjour », on ne l’entendra plus, presque jusqu’à la fin. Bartabas le cavalier, et maître des lieux (le Fort Zingaro), est arrivé aussi. Chacun, le filmeur, le cavalier, fait ce qu’il a à faire, et où il excelle. Et cela engendre, dans le film, la montée en puissance d’un être de plus en plus présent, masse de 800 kilos, couleurs étonnante et changeante, œil, bouche, cuisse, encolure, crinière. Une être fantastique et très réel.

On n’entend presque pas la voix de Cavalier, on ne voit presque pas le visage du cavalier, tout se focalise sur la présence du Caravage. Et par lui, c’est un monde qui devient visible. Telle une divinité antique, il est servi, nourri, pansé, bouchonné par un groupe de très jeunes filles, vestales d’un culte précis, à la fois technique et très physique –y compris, forcément, dans les dimensions sensuelles de cette relation étrange, rituel répondant à des exigences qui suscitent, dans l’air froid de l’aube, les vapeurs et les bruits sourds et puissants, leur part d’onirisme et de fantasme. (…)

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« Le Paradis » d’Alain Cavalier : le petit Pan est vif

photo5_10237 Le Paradis d’Alain Cavalier. 1h20. Sortie le 8 octobre.

Qui a vu des films d’Alain Cavalier des vingt dernières années, ces films qu’il accompagne de sa voix si singulière, a peut-être noté l’usage important de l’adjectif « inouï ». Le mot ne désigne pas seulement les phénomènes sonores jusque-là inconnus, mais toute manifestation sortant absolument de l’ordinaire, dans quelque registre que ce soit. Le Paradis est un film inouï.

D’abord on croit retrouver cette veine, à la fois intimiste et ouverte sur l’infini, du monde qui caractérise l’œuvre du « Filmeur » au moins depuis La Rencontre en 1996. Et ce sera d’ailleurs bien cela, mais selon un régime « renouvelé des Grecs », comme l’est le jeu de l’oie auquel ce Paradis s’apparente à plus d’un titre.

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Comme une danse réglée, un gros oiseau marche dans l’herbe, flanqué d’un petit. Cc’est gracieux et intrigant, banal et comique. Ce sont des paons. Et puis voilà, il est mort, le petit. Et alors s’enclenche une étrange suite d’actions, l’édification d’un monument funéraire à la mémoire du piaf, et à son échelle, tandis que s’accomplit le grand cycle des saisons et que le monde change d’apparence quand vient l’automne puis la neige, mais aussi que l’intervention des humains perturbe le paysage, et puis hop c’est le moment d’émotion joyeuse des retrouvailles avec la permanence quand tout paraissait bouleversé, et déjà la voix d’une petite fille qui parle allemand, des clous que le Coca ne dérouille pas, Ulysse rêvant d’Ithaque, Abraham qui emmène Isaac dans la forêt, et Jésus laissant ses amis après dîner. Oiseau, héro, bidule, saisons, divinité, enfant, les voilà, nous voilà embarqués dans d’immenses et terribles aventures, un petit robot jouet rouge et une oie de terre cuite, un œuf en cristal taillé qui diffracte la lumière. Symboles, métaphores? Pfuitt! Ne vous souciez pas de cela, nous avons bien davantage à faire. Un chat passe.

C’est quoi, ça ? Ben, euh, un film. Bon, un film pas comme d’habitude, d’accord. Mais pourtant aussi comme les autres films : la reprise par un auteur, ô combien présent malgré son apparente discrétion, des grands récits fondateurs de l’humanité (disons: de l’humanité occidentale), mythes rendus sensibles dans un enchainement de péripéties matérialisées par des humains, des objets, des animaux, des mouvements, des mots. Ce qui précède pourrait décrire les trois quarts des films existants à ce jour, pour ne mentionner que les films. Sauf que la manière dont c’est fait ne ressemble à strictement aucun film fait à ce jour, y compris par Alain Cavalier.

Comment ça marche? Deux mots-clés : liberté et jeu. Ou alors un seul : poésie. Liberté absolue des enchainement/déchainements d’idées, d’images, d’éléments sensibles, de références mythologiques, quotidiennes, historiques, mais selon un principe ludique qui à la fois ne cesse de relancer les dés et pourtant construit une cohérence sous-jacente. Poésie fondée sur la libre association, qui n’exclut pas la rigueur de la composition, qui l’appelle naturellement au contraire. Le Paradis est un film mallarméen, pas de quoi s’en effrayer, c’est aussi le plus accueillant des contes.

Heureux qui comme Ulysse ira se laisser ballotter par ce flot-là, il y rencontrera d’innombrables surprises, sirènes, fétiches. Rien de gratuit ni de désinvolte dans cette liberté, mais la prise en charge, le sourire aux lèvres, des grands motifs et les petits trucs qui font l’humanité des humains. Si la manière est assurément inédite, on peut malgré tout chercher dans l’œuvre du cinéaste des précédents à cet étonnement où se mêlent admiration, perplexité et affection profonde pour ce qui relie les hommes au monde, y compris par les histoires qu’ils se racontent depuis la nuit des temps. C’était, très différemment, au principe de Thérèse, et aussi de son admirable évocation du peintre Pierre Bonnard, vibrante d’un panthéisme de chaque jour et à jamais.

C’est pourquoi en entendant Cavalier constater que « le petit paon est mort », on ne peut s’empêcher, songeant au Grand Pan est mort de Plutarque, de Pascal et de Brassens, d’entendre combien, très simplement, le film a témoigné que le petit Pan, esprit modeste qui palpite au creux des nos choses de chaque jour comme dans les songes des enfants et des adultes, est lui bien vivant. Un paradis, quand même, ci et maintenant. Et cela est proprement inouï.

 

Ave Césars, ceux qui ne seront pas là vous saluent

Cette année comme chaque année, mais cette année plus qu’une autre, les nominations pour les Césars [PDF] racontent un état du cinéma en France. Le «portrait de groupe» composé par les nommés est significatif par sa composition, comme du fait de ceux qui en sont exclus. Et dans sa composition, il faut considérer aussi bien ceux qui dominent que ceux qui sont marginalisés.

2011 aura été une année remarquable, du fait de la fréquentation record des salles, et avec au moins quatre films phénomènes: le triomphe commercial d’Intouchables qui vogue vers les 20 millions d’entrées, le triomphe médiatique et international (c’est-à-dire surtout aux Etats-Unis) de The Artist, et le succès considérable de deux jeunes réalisatrices, Maiwenn avec Polisse et Valérie Donzelli avec La guerre est déclarée.

Grâce à des modifications récentes du règlement, ayant porté de 5 à 7 le nombre de nommés comme meilleur film et meilleur réalisateur, la liste des candidats en lice pour la distribution de statuettes du 24 février reflète à peu près ces aspects saillants. Avec ce correctif que la comédie de Nakache et Toledano n’est pas représentée proportionnellement à son succès.

Comme toujours, il ne manquera pas de faux naïfs pour s’étonner que la fréquentation ne se traduise pas mécaniquement dans la distribution des prix, comme si ceux-ci n’étaient pas précisément destinés à faire prévaloir d’autres logiques. Comme toujours, il faudra répondre que s’il s’agissait de distinguer ceux qui ont eu le plus de succès, il n’y aurait nul besoin d’organiser un vote, il suffirait de regarder le box-office. Ceux-là, les faux naïfs, sont les mêmes qui pensent toujours que le marché devrait seul décider de tout.

Parmi les choix des 4.199 professionnels du cinéma électeurs des Césars, on peut noter le nombre particulièrement élevé de nominations (13) pour un film aussi racoleur que Polisse, qui déballe les ficelles les plus éculées de la sitcom en les pimentant de la souffrance des enfants, utilisée ici comme faire-valoir de manière particulièrement obscène.

C’est certainement le versant le plus antipathique du résultat d’un vote par ailleurs assez diversifié…

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De Cavalier à Cavalier, une histoire de visages

 

Tandis que son sidérant Pater poursuit son beau parcours dans les salles, Alain Cavalier est encore deux fois présent cet été, grâce à deux sorties DVD. Ceux-ci mettent en lumière de manière particulièrement lisible, et plaisante, l’étonnant parcours de ce cinéaste.

Le premier de ces DVD, édité par Solaris, rend accessible en vidéo ce qui était devenu une rareté : La Chamade, réalisé par Cavalier en 1968. Cette adaptation du best-seller de Françoise Sagan, avec Catherine Deneuve et Michel Piccoli, est aujourd’hui une curiosité agréable à regarder, surtout pour les effets d’époque (ah les coiffures !), et le plaisir de retrouver un « moment » du talent des deux acteurs principaux. Au fil des péripéties de ce marivaudage upperclass entre une charmante oisive, un homme d’affaires et un jeune éditeur impécunieux, on ne cesse de retrouver les (lointains) échos avec les films des années 60 signés Godard, Truffaut ou Demy où apparaissaient les mêmes acteurs.

Mais La Chamade est aussi exemplaire d’une certaine dérive de ce qui a fait partie du surgissement moderne dans le cinéma français au début des années 60 surnommé Nouvelle Vague. Un cinéma de son époque, mais sans inventer de voie nouvelle, c’est à dire de nouvelles manière de filmer, de raconter en cinéma. Comme ses contemporains et amis Louis Malle, Jean-Paul Rappeneau ou Claude Sautet, Alain Cavalier est un réalisateur doué, imprégné de la sensibilité de l’époque, mais qui se garde bien alors de quelque audace formelle ou exploration esthétique – à la différence des Godard, Resnais, Rohmer, Varda, Rivette, Demy, mais aussi, quoiqu’on en ait dit, Truffaut ou Chabrol.

Avec La Chamade, ses artifices, ses décors luxueux, ses stars, ses costumes haute couture, sa psychologie en abscisse et sa sociologie en ordonnée, on atteint à un sommet du « nouvel establishment » du cinéma français qui s’est alors mis en place. Comme le roman de Sagan, il ne boude pas la provocation, portée par l’« immoralité » de la jeune et belle Lucille, jouisseuse sans complexe, et – pas évident à l’époque – par l’évocation explicite de l’avortement. Le conformisme de la réalisation n’en est que plus visible, et pesant.

La date du film, 1968, compte évidemment. C’est très exactement à ce moment-là que Cavalier rompt sans retour avec une idée du cinéma qu’incarne à l’extrême sa Chamade. « A l’extrême », mais pas de manière caricaturale, tant tout cela est léger, et, avec le recul du temps, plutôt plaisant à regarder (comme Le Sauvage de Rappeneau qui vient de ressortir en salles, par exemple).

Le second DVD est édité par Documentaire sur grand écran dans le cadre d’une nouvelle collection, « Les collections particulières ». Les Braves porte à son paroxysme l’exigence et la confiance qu’Alain Cavalier a commencé de mettre dans les puissances du cinéma, au fil d’un long parcours initié par la rupture dans son parcours de cinéaste après La Chamade – rupture qui correspond aussi à des crises intimes, comme le savent les spectateurs de Ce répondeur ne prend pas de message et d’Irène. « Les Braves » : trois hommes, trois plans fixes, trois récits à la première personne du singulier. Raymond Lévy, résistant qui après un voyage hallucinant parvint à s’évader du train qui l’emmenait en déportation, Michel Alliot, prisonnier qui réussit à s’évader d’un camp allemand, Jean Widhoff qui, officier en Algérie, s’opposa l’arme au poing à la torture. Des visages, des voix, des mots : hyper-minimalistes, aux antipodes de la machinerie spectaculaire de La Chamade, ces trois films (qui font partie d’une série destinée à être continuée) se déploient entièrement dans le regard et l’esprit du spectateur, à mesure que la « grande histoire » et les « grands principes » se trouvent grandis de l’humilité avec lesquels ceux qui étaient alors de très jeunes gens, aujourd’hui des hommes âgés, décrivent ce qu’ils ont fait, ce qu’ils ont éprouvé, ce qu’ils ont pensé.

En apparence, tout oppose les films qui se trouvent sur ces deux DVD. Mais pour l’édition DVD de La Chamade, Alain Cavalier a réalisé un bonus très simple, intitulé Elle, seule… Par un montage sans apprêt, il trouve dans le film d’il y a 43 ans quelque chose qui anticipe son cinéma d’aujourd’hui : l’attention avec laquelle il filmait le visage de Catherine Deneuve, et l’infinie richesse de ce que celle-ci donnait à la caméra, sous l’apparente uniformité de sa beauté ultra-formatée, ultra-maquillée y compris au lit ou à la plage. Il suffisait d’une intonation  – le « ah non, il se casse pas » de Lucille jetant à terre son faux diamant est un vrai diamant de jeu en finesse à l’intérieur d’une situation on ne peut plus convenue – pour que Deneuve  excède, plus encore que son rôle, son personnage de gravure de mode appelée à poser pour de grandes marques de cosmétiques. C’est cette richesse que, tant d’années après, Cavalier retrouve dans ses propres plans, avec la sensibilité de celui qui a su filmer comme des épopées les plans fixes des Braves.

Pater, ou la table de l’égalité

La lumière, c’est-à-dire l’écran, n’est pas encore allumée. On entend deux voix qui discutent, question sérieuse: deux amis qui préparent leur repas. Ces voix, on les connaît. Il y a celle de l’acteur Vincent Lindon. Il y a celle du réalisateur Alain Cavalier, devenu peu à peu aussi l’acteur de ses films, jusqu’ici le plus souvent invisible derrière sa caméra (parfois pourtant, un miroir), mais dont le commentaire chuchoté est devenu avec La Rencontre, Le Filmeur, Irène, un élément de ce cinéma à la première personne qu’il invente depuis quinze ans, avec ses caméras légères pour mieux aller à la rencontre du monde, des souvenirs, de quelque chose qui aurait à voir avec la vérité. Quelque chose de plutôt amusant, et très souvent bouleversant.

Ça y est la lumière est allumée, les deux compères sont dans la cuisine, on ne les voit pas encore…

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A regarder ici, deux scènes inédites de Pater, pour Slate.fr